Page:Sénèque - Œuvres de Sénèque le philosophe, Tome 2, trad Baillard et du Bozoir, 1860.djvu/332

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comme certaines affections du corps se gagnent par le contact l’âme communique ses vices à qui l’approche. Un ivrogne entraîne ses commensaux à aimer le vin ; la compagnie des libertins amollit, à la longue, le cœur le plus ferme et le plus héroïque, et l’avare peut nous infecter de la lèpre qui le consume. Dans un ordre différent, l’action des vertus est la même : elles répandent leur douceur sur tout ce qui les environne. Jamais un climat propice, un air salubre n’ont fait aux valétudinaires tout le bien qu’éprouve une âme convalescente à fréquenter des personnes qui valent mieux qu’elle. L’effet merveilleux de cette influence se reconnaît même chez les bêtes féroces, qui s’apprivoisent au milieu de nous ; et le monstre le plus farouche perd quelque chose de son affreux instinct, pour peu qu’il habite longtemps sous le toit de l’homme.

Des caractères doux émoussent peu à peu et font disparaître les aspérités du nôtre. Mais aux bienfaits de l’exemple qui nous améliore se joint un autre avantage : près des gens paisibles nul motif de nous emporter, et, partant, de donner carrière à notre défaut.

Fuyons donc tous ceux que nous saurons capables d’exciter notre penchant à la colère : « Mais qui sont-ils ? » Tous les hommes qui, par des causes diverses, produisent sur nous ce même effet. L’homme hautain vous choquera par ses mépris, le caustique par son persiflage, l’impertinent par ses insultes, l’envieux par sa malignité, le querelleur par ses contradictions, le fat par sa jactance et ses mensonges. Vous n’endurerez pas qu’un soupçonneux vous craigne, qu’un opiniâtre vous pousse à bout, qu’un efféminé vous dédaigne.

Choisissez donc des personnes simples, faciles, modérées,