Page:Sénèque - De la vie heureuse.djvu/2

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


I. Vivre heureux, mon frère Gallion, voilà ce que veulent tous les hommes : quant à bien voir ce qui fait le bonheur, quel nuage sur leurs yeux ! Et il est si difficile d’atteindre à la vie heureuse, qu’une fois la route perdue, on s’éloigne d’autant plus du but qu’on le poursuit plus vivement ; toute marche en sens contraire ne fait, par sa rapidité même, qu’accroître l’éloignement. Il faut donc d’abord déterminer la fin vers laquelle nous devons tendre, ensuite chercher les moyens les plus directs pour l’atteindre ; une fois en route, si nous sommes engagés sur la bonne voie, nous comprendrons quelle perte produit chaque jour une mauvaise direction, et combien est plus voisin de nous ce but vers lequel nous pousse l’inclination naturelle. Mais tant qu’on marche à l’aventure, sans guide et suivant le hasard des vagues rumeurs et des clameurs contradictoires qui nous