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Si la vertu se perd quand on gagne l’empire,
Lorsque vous règnerez, que serez-vous, hélas !
Si vous êtes cruel quand vous ne régnez pas ?

(Racine, les Frères ennemis, acte iv, sc. 3)

Page 295. Quoi ! pour errer toujours par le monde ?

Ne vous semble-t-il point que la gloire d’un prince
Soit d’errer vagabond de province en province ?
Chassé de mes états, de mes biens, de ma cour,
De mon partage encor dois-je point de retour ?
Que pourrais-je avoir pis, si j’étais le parjure,
Si j’avais violé les droits de la nature ?
Il faut qu’un traître règne et que je sois banni !
Il sera le coupable et je serai puni !
Non, non, le droit ordonne en première maxime,
Le prix à l’innocence, et le supplice au crime.

(Rotrou, Antigone, acte ii, sc. 4.)

Page 297. Livré à mon épouse, j’aurai donc à subir les caprices d’une femme heureuse et puissante.

Quoi ! ma grandeur serait l’ouvrage d’une femme !
D’un éclat si honteux je rougirais dans l’âme.
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
Je veux m’ouvrir le trône ou jamais n’y paraître ;
Et quand j’y monterai, j’y veux monter en maître ;
Que le peuple à moi seul soit forcé d’obéir,
Et qu’il me soit permis de me faire haïr.
Enfin, de ma grandeur je veux être l’arbitre,
N’être point roi, madame, ou l’être ajuste titre, etc.

(Racine, les Frères ennemis, acte iv, sc. 3)

Si tu veux absolument régner, si ta main ne peut se passer d’un sceptre violemment conquis.

Je sais qu’à votre tête il faut une couronne ;
Mais que, hors de chez nous, votre main vous la donne.
Faut-il que d’un seul lieu vos desseins soient-bornés ?
Et ne saurais je avoir deux enfans couronnés ?
Montez, le fer en main les rochers du Tymole ;
Soumettez-vous les lieux qu’arrose le Pactole.
Osez ce qu’ont osé tant d’autres conquérans,
Tenez tout de vous-même, et rien de vos parens.

(Rotrou, Antigone, acte ii, sc. 4.)