Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 2.pdf/387

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Croit-il que n’offenser ce soit si peu de chose ?
Quoi ! mon père trahi, les élémens forcés,
D’un frère dans la mer les membres dispersés,
Lui font-ils présumer mon audace épuisée ?
(Corneille, Médée, acte i, sc. 4.)

Page 243. Ton frère, malheureux compagnon de ta fuite, mis en pièces. Suivant la fable, Médée avait emmené avec elle son frère Absyrte. Poursuivie dans sa fuite par son père, elle tua cet enfant, coupa son corps en pièces, et en sema les débris sur sa route.

Unde Tomos dictus locus est, quia fertur in illo
Membra soror fratris consecuisse sui….
(Ovid.)

Page 245. Les membres du vieux Pélias. Médée avait rajeuni Éson, père de Jason. Les filles de Pélias la prièrent de rajeunir aussi leur père ; elle coupa en morceaux un vieux bélier, le jeta dans une chaudière bouillante, et l’en retira vivant et rajenni. Les filles de Pélias le mirent aussi en pièces, et le jetèrent dans la chaudière, où Médée le laissa se consumer.

Il devait offrir son cœur au fer homicide. L’amour de Médée parle ici comme le patriotisme du vieil Horace. Nous ne doutons pas que notre grand Corneille n’ait pris à Sénèque le fameux : « Qu’il mourût ! »

Que Jason vive, et qu’il soit toujours à moi. Ce langage, plein d’amour et de sensibilité, doit intéresser vivement les spectateurs au sort de Médée, et quoique ensuite elle se montre ce qu’Ilo- race dit qu’elle doit être, ferox invictaque, ces paroles du moins plaident en sa faveur, et prouvent que les sentimens affectueux et tendres avaient place dans cette âme violente et emportée.

Page 247. Quand on n’espère plus, c’est alors qu’on ne doit pas désespérer. Apparemment parce que le comble des maux en produit le remède.

Ou qu’un beau désespoir alors le secourut,

dit Corneille ; et Virgile avait dit avant lui :

Una salus victis nullam sperare salutem.
Le salut des vaincus est de n’en point attendre.