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Page 291. Plus tristes que ceux des filles de Pandion. Proené et Philomèle, filles de Pandion, roi d’Athènes, changées, la première en hirondelle, et la seconde en rossignol.

O ma mère ! l’éternel sujet de mes larmes, et la première cause de mes maux. C’est Messaline ; femme de Claude, mère de Britannicus et d’Octavie. Ses débauches sont célèbres, et l’on connaît le tableau qu’en a fait Juvénal, dans la satire contre les femmes, où

......Poussant à bout la luxure latine,
Aux portefaix de Rente il vendit Messaline.

Cette fougue de libertinage, portée jusqu’à la folie, causa sa mort. On trouvera dans Tacite, Annales, liv. xi, chap. 26-38, le récit fabuleux (haud sum ignarus fabulosum visum iri) de son mariage public avec Caïus Silius, consul désigné, du vivant de Claude, qui était allé faire un sacrifice à Ostie. Ce fut la première fois, dit l’historien, que l’empereur cessa d’ignorer les déhanches de sa femme, Silius, et tous ceux qui avaient pris part à ce mariage, furent mis à mort. Messaline, retirée dans les jardins de Lucullus, espérait bien obtenir sa grâce, quoiqu’elle eût conspiré contre la vie de son époux autant que contre son honneur. Mais l’affranchi Narcisse déploya dans cette affaire une audace et une opiniâtreté qui suppléèrent à la faiblesse et à l’insouciance de Claude. Au moment où l’empereur donnait l’ordre de lui amener Messaline pour qu’elle pût plaider sa cause et se justifier, Narcisse envoya l’affranchi Évode pour la mettre à mort. Lepida, sa mère, la pressait de se tuer elle-même : mais cette âme, flétrie par la débauche, n’avait conservé aucun sentiment honnête : « Animo per libidines corrupto nihil honestum inerat. » Elle prit cependant une épée ; mais elle n’eut ni le courage ni la force de s’en frapper : un tribun des soldats le fit pour elle. Sa mort fut à l’instant même annoncée à Claude qui était à table, et qui, sans s’informer si cette mort avait été volontaire ou forcée demanda à boire, et finit son dîner aussi gaîment qu’à l’ordinaire : « Poposcit poculum et solita convivio celebravit. » Le crime et la mort de Messaline entraînèrent la ruine de ses enfans.

Page 293.Cette furie qui alluma les torches fatales de mon hymen.