Page:Sénèque - Tragédies (éd. Cabaret-Dupaty), 1863.djvu/152

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

la mort et de la chercher ? Ce serait une faiblesse. Souhaiter de mourir, ce n'est pas mépriser la mort. Quand la mesure de ses maux ne peut plus s'étendre, l'homme arrive par là même à une situation tranquille. Supposez qu'un dieu voulût ajouter quelque chose à votre infortune, le pourrait-il jamais ? Vous ne le pouvez pas non plus, à moins que ce soit en pensant que vous méritez de mourir. Vous ne le méritez pas : votre cœur est exempt de crime, et vous avez d'autant plus de droit de proclamer votre innocence, ô mon père, que les dieux ont tout fait pour vous la ravir.... Qui peut ainsi troubler votre âme, et soulever en vous ce nouveau transport ? Quelle puissance vous pousse vers la nuit infernale, et vous chasse de cette nuit où vous êtes ? Voulez-vous fuir la lumière du jour ? vous ne la voyez plus. Songez-vous à quitter votre riche palais et votre patrie ? Quoique vivant encore, la patrie n'est plus pour vous. Est-ce pour fait votre épouse et vos enfants ? la Fortune vous a dérobé la vue de tous les mortels. Il ne reste rien à votre vie même de tout ce que là mort pourrait vous ôter. L'appareil bruyant de la royauté, cette cour nombreuse qui vous entourait autrefois, vous y aviez volontairement renoncé. Qui donc fuyez-vous, mon père ?


Œdipe. — Moi-même, et tous les complices de mon crime, ce cœur,