Page:Sénèque - Tragédies (éd. Cabaret-Dupaty), 1863.djvu/154

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Mon âme n'en admet aucune. Je cherche un nouveau supplice égal à mes forfaits. Où pourrai-je le trouver ? Dès l'enfance je fus condamné à mourir. Quel homme a subi jamais d'aussi tristes destinées ? Je n'avais pas vu le jour, je n'avais pas brisé les liens qui me retenaient dans le sein de ma mère, que déjà l'on me craignait. On a vu des enfants mourir au moment de leur naissance, et trouver l'ombre de la mort au seuil de la vie. La mort n'a pas même attendu ma naissance. D'autres ont été frappés dans le sein de leur mère, mais du moins sans avoir commis aucun forfait. Moi je n'avais pas encore vu la lumière, et l'on ignorait même si j'existais, quand Apollon me déclara coupable d'un crime abominable. C'est sur son témoignage que mon père me condamna, me fit percer les pieds d'un fer brûlant, et exposer dans une épaisse forêt pour y servir de pâture aux bêtes et aux oiseaux cruels que l'affreux Cithéron a plus d'une fois nourris du sang des rois.

Condamné par un dieu, repoussé par mon père, je me vois encore abandonné de la mort. J'ai accompli l'oracle de Delphes : j'ai attaqué mon père, et suis devenu parricide. Toutefois un sentiment plus doux rachète cette action barbare. J'ai tué mon père ; mais j'ai aimé ma mère. J'ai honte de parler de cet hymen et de ce