Page:Sénèque - Tragédies de Sénèque, trad Greslou, ed 1863.djvu/419

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même, quand, la douleur ranimant son fier courage, il vint fondre sur nos remparts et porter l'effroi dans nos cœurs.

Troie a perdu la seule gloire qui pût lui rester dans sa ruine, celle de périr noblement. Elle a résisté dix ans pour être victime d'un stratagème nocturne. Nous avons vu ce cheval immense dont on prétendait faire hommage à nos dieux ; et, follement crédules, nous avons introduit nous-mêmes dans nos murs ce fatal présent des Grecs. Plus d'une fois nous vîmes trembler sur le seuil dé notre ville ce monstrueux colosse qui portait dans ses flancs une armée ennemie. Il ne tenait qu'à nous d'éclaircir ce perfide mystère, et de prendre les Grecs dans leurs propres pièges. Plus d'une fois le choc des boucliers et un sourd murmure frappèrent nos oreilles, et nous entendîmes les frémissements de Pyrrhus qui ne se prêtait qu'avec peine aux fourberies d'Ulysse.

Sans nulle crainte, les jeunes Troyens se plaisaient à toucher les cordes sacrées. Astyanax marchait à la tête des enfants de son âge; nos vierges étaient conduites par la princesse fiancée au tombeau d'Achille. Hommes et femmes, parés comme pour un jour de fête, se pressaient dans les temples et offraient aux dieux