Page:Sénèque - Tragédies de Sénèque, trad Greslou, ed 1863.djvu/533

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plutôt que ce tyran féroce. Il hait tout ce qui sort d’un sang illustre ; il méprise les hommes et les dieux, enivré de la puissance que son exécrable mère lui obtint par un crime affreux. Quoique l’ingrat rougisse de devoir l’empire à son odieuse mère ; quoiqu’il lui ait donné la mort en reconnaissance d’un tel bienfait, elle n’en conserver# pas moins, après son trépas, l’éternelle gloire de le lui avoir transmis.

la nourrice. — Calmez votre colère, et ne laissez pas échapper ces paroles imprudentes.

octavie. — Quand je pourrais souffrir mes malheurs avec patience, ils n’en finiront pas moins par une mort cruelle. Après le meurtre de ma mère, l’assassinat de mon père et la perte de mon frère, abattue sous le poids des chagrins et des maux, consumée d’ennuis, odieuse à mon époux, esclave d’une sujette, je regarde la vie comme un fardeau. Livrée à de continuelles frayeurs, ce n’est pas la mort que je redoute, mais le crime. Puisse-t-il n’avoir aucune part dans mon trépas ! Je mourrai alors avec joie. Mais ce serait pour moi, malheureuse, un supplice plus affreux que la mort, de voir le visage cruel et terrible de mon tyran, de souffrir les baisers d’un ennemi, d’appréhender ses