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NOTICE BIOGRAPHIQUE


de vengeance, n’avait pas écrit ce portrait de l’Histoire amoureuse, qui affligea tant madame de Sévigné, la postérité, personne assez peu charitable, n’aurait peut-être parlé qu’en hochant la tête, de l’amitié du cousin et de sa jolie cousine. Dans son Histoire généalogique, Bussy a rendu à madame de Sévigné ce témoignage « qu’elle n’aima jamais que son mari, bien que mille honnêtes gens (il songeait un peu à lui-même) eussent fait des tentatives auprès d’elle. » Mais là son attestation pouvait être suspecte, tandis que, dans une œuvre de médisance, il faut bien l’en croire. En vain s’efforce-t-il d’y faire la part de la méchanceté, en cherchant, subtil casuiste, ce que le mari de madame de Sévigné a pu être devant Dieu : il est forcé de convenir « qu’il s’est tiré d’affaire devant les hommes. » C’est bien quelque chose.

Dans un temps et dans un monde où les mœurs étaient loin d’être bonnes, d’autres que Bussy durent chercher à entraîner dans quelque faiblesse une jeune femme très séduisante, qui avait tant à se plaindre de son mari et que faisaient quelquefois mal juger la liberté et la gaieté de son humeur, et l’habitude qu’elle avait de « dire tout ce qu’elle croyait joli, quoique ce fussent souvent des choses un peu gaillardes[1]. » Quelques vers de la Muse de Loret confirment les paroles de Tallemant que nous venons de rapporter, et ce que dit Bussy dans le même sens, que « pour une femme de qualité on trouvait son caractère un peu trop badin. » Le gazetier burlesque nous la montre, dans cette année 1650, liée avec deux étourdies qui n’avaient pas la même sagesse qu’elle, la comtesse de Fiesque et madame de Montglas :


Toutes trois jeunes et brillantes,
De belle humeur et fort galantes.


S’il faut l’en croire, le prince d’Harcourt avait pris la résolution de mettre fin aux visites un peu trop fréquentes faites à la princesse sa femme par ces trois dames, qui lui étaient « suspectes


Pour être un peu trop guillerettes[2].


Loret, peu bienveillant pour les frondeuses, a pu exagérer. Il

  1. Tallemant, Historiette de Sévigny et de sa femme.
  2. Muse historigue du 16 juillet 1650, tome I , p. 27.