n’a pas cependant entièrement inventé cette réputation d’engouement trop vif qui ne pouvait manquer d’encourager les
adorateurs. Nous ne saurions connaître les mille honnêtes gens
qui s’étaient mis sur les rangs avec Bussy. Il y en a cependant
quelques-uns à citer : le comte de Vassé, que nous avons eu
déjà l’occasion de nommer, descendant d’une très ancienne et
très noble maison, allié des Gondi et des Sévigné, frondeur
comme eux et ayant eu un commandement important dans la
guerre civile : ses aventures galantes avaient fait du bruit, et
sa fatuité lui avait mérité le surnom de Son Impertinence ; le
comte du Lude, autre homme à bonnes fortunes, fort la mode,
brave, élégant, magnifique[1], beau danseur, esprit fin et agréable,
diseur de mots spirituels, dangereux en amour par les larmes
qu’il savait répandre, et resté plus cher que tous ses rivaux au
souvenir de madame de Sévigné ; enfin un cousin de son mari,
le comte de Montmoron, conseiller au parlement dé Rennes. Il
faisait des vers qu’il lisait à madame de Sévigné ; elle lui trouvait beaucoup d’esprit et de goût[2]. Il est nommé, parmi ses
amants, à côté du comte angevin (du Lude) et du comte bourguignon (Bussy), dans le pamphlet du prince de Conti intitulé :
Carte du pays de Braquerie[3]. On pourrait grossir de plusieurs
autres noms la cour de la belle marquise ; mais il y en aurait
plusieurs qu’on ne placerait peut-être pas à cette date sans
anachronisme ; et quelques-uns, avec qui nous avons déjà fait
connaissance, Saint-Pavin, Montreuil, Marigny, n’étaient probablement pas, malgré leurs vers galants, des soupirants très
sérieux.
Quel qu’ait été d’ailleurs le nombre de ces poursuivants, ils eurent tous le même sort que Bussy. Un peu de coquetterie et beaucoup de bienveillance aimable, répandue sur tout le monde, pouvait donner parfois quelque espérance à leur amour-propre ; mais bientôt, sans que la vertu de madame de Sévigné fît un fâcheux éclat, quelque mot spirituel, quelque