Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 11.djvu/339

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mot me traiter en enfant cela est pitoy able ma pre- mière enfance étoit bien plus raisonnable que celle-ci. Vous me mandez de si grandes et si belles nouvelles, qu’il n’y a pas moyen de les croire tout d’un coup. Je m’arrête aux amours de Daphnis et Chloé, c’est-à-dire Fourrière et Valière. Je crois cela, par exemple, et j’attendrai encore quelque temps pour tout le reste. Vos1 tracasseries domestiques sont croyables aussi, et j’en suis bien fàehée mais si vous n’y avez nulle part, si vous y portez un cœur franc et net, c’est-à-dire le vôtre, si vous voulez bien faire usage de votre bel et bon esprit, si vous voulez bien défendre votre imagination de vous tourmenter et de vous présenter toujours les objets du côté triste, très-assurément, Monsieur, vous surmonterez tout, et vous deviendrez le maître de votre destinée. Mais prenez garde qu’il n’y ait quelque ver solitaire qui ronge ce pauvre cœur; je vous avoue que je l’ai toujours un peu soupçonné je vous le dis de loin hardiment, ce que je n’osois pas trop faire de près; mais tant y a, arrachezmoi ce ver, s’il vous plaît, par la tête, par la queue, jetezmoi tout cela, et qu’il n’en soit plus question.

Vous ne voulez pas que j’effraye Boismortier; mais savez-vous, Monsieur, qu’il falloit me ménager aussi, et que son affaire est totalement la mienne? Je vous avoue que je ne résisterois pas à le voir chasser d’une place qu’il mérite seul et si bien à moins que vous n’envoyiez la Peyronie ou gens de cette classe, je vous défie d’avoir Lettre 14S. 1. Le reste de la lettre manque dans l’édition de 1773.

a. Tel est le texte de l’édition de 18 18. Faut-il lire «défendre à votre imagination » ?

3. François de la Peyronie, premier chirurgien de Louis XV, membre de l’Académie des sciences, et le restaurateur de l’école de chirurgie de Paris. Il mourut en 1747, à l’âge de soixante-neuf ans. (Note de l’édition de 1818.)