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1675Mme de Villars me mande encore des merveilles du chevalier de Grignan : je crois que ce sont les premières qu’on a renouvelées ; mais enfin c’est un petit garçon qui a bien le meilleur bruit qu’on puisse jamais souhaiter. Je prie Dieu que les lueurs d’espérance pour une de vos filles[1] puissent réussir ; ce seroit une grande affaire. La paresse du Coadjuteur devroit bien cesser dans de pareilles occasions.

Écoutez une belle action du procureur général[2] Il avoit une terre, de la maison de Bellièyre, qu’on lui avoit fort bien donnée ; il l’a remise dans la masse des biens des créanciers, disant qu’il ne sauroit aimer ce présent, quand il songe qu’il fait tort à des créanciers qui ont donné leur argent de bonne foi : cela est héroïque. Jugez s’il est pour nous contre M. de Mirepoix[3] ; je ne connois point une plus belle ni une plus vilaine âme que celle de ces deux hommes. Le bien Bon est toujours le bien bon ; ce sont des armes parlantes : les obligations que je lui ai sont innombrables ; ce qui me les rend sensibles, c’est l’amitié qu’il a pour vous, et le zèle pour vos affaires, et comme il se prépare à confondre le Mirepoix. Je n’ose penser à vous voir : quand cette espérance entre trop avant dans mon cœur, et qu’elle est encore éloignée, elle me fait trop de mal. Je me souviens de ce

  1. Il était question alors d’un établissement pour Françoise-Julie de Grignan (Mlle d’Alerac) ; mais ce projet n’eut pas de suite. Mlle d’Alerac ne se maria qu’en 1689, avec le marquis de Vibraye, lieutenant général des armées du Roi. Voyez la Notice, p. 250 et suivantes.
  2. Achille de Harlay, depuis premier président. (Note de Perrin.) Il avait recueilli la terre dont il est ici question dans la succession de sa mère, Jeanne-Marie de Bellièvre, morte en 1657.
  3. Dans le procès relatif à la transaction faite par M. de Grignan avec les héritiers de Mlle du Puy-du-Fou, sa seconde femme. Voyez ci-dessus, p. 76, la note 16 de la lettre du 21 août précédent.