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à-dire moi[1], qui sais mon fils à son devoir, sans aucun péril présentement.

L’autre jour Monsieur le Dauphin tiroit au blanc ; comme votre fils, il tira fort loin du but : M. de Montausier se moqua de lui, et dit tout de suite au marquis de Créquy[2], qui est fort adroit, de tirer ; et à Monsieur le Dauphin : « Voyez comme celui-ci tire droit. » Le petit pendard tire[3] un pied plus loin que Monsieur le Dauphin. « Ah ! petit corrompu, s’écria M. de Montausier, il faudroit vous étrangler. » M. de Grignan se souviendra bien de ce petit courtisan ; il nous a conté des choses pareilles.

Vous devriez lire, c’est-à-dire avoir les Croisades[4] : vous y verriez un Aimar de Monteil, et un Castellane[5],

  1. C’est le texte de 1726 et de 1734. Dans l’édition de 1754 : « J’ai voulu dire moi. »
  2. François-Joseph, alors âgé de treize ans, colonel du régiment de la Fère en 1677, et du régiment d’Anjou en 1680, puis lieutenant général il fut tué à Luzzara, le 15 août 1702. « C’étoit le seul fils du feu maréchal de Créquy et gendre du duc d’Aumont, sans enfants. Sa probité ni sa bonté ne le firent regretter de personne, mais bien ses talents à la guerre, où il étoit parvenu à une grande capacité par son application et son travail sa valeur étoit également solide et brillante, son coup d’œil juste et distinctif. Tout se présentoit à lui avec netteté, et quoique ardent et dur, il ne laissoit pas d’être sage. C’étoit un homme qui touchoit au bâton et qui l’auroit porté aussi dignement que son père. Il avoit été fort galant, et on voyoit encore qu’il avoit dû l’être. Avec cela beaucoup d’esprit, plus d’ambition encore, et tous moyens bons pour la satisfaire. » (Saint-Simon, tome III, p. 431, 432.)
  3. « Le petit cependant tira…. » (Édition de la Haye, 1726.) Deux lignes plus bas, au lieu des mots : « Il faudroit vous étrangler, » on lit dans la même édition : « Vous en savez trop. »
  4. L’Histoire des Croisades du P. Maimbourg. Voyez la Notice, p. 164, et la fin de la lettre du 14 septembre suivant.
  5. Blanche Adhémar de Monteil épousa Gaspard de Castellane en 1498. Leur fils, Gaspard de Castellane, fut héritier de Louis Adhémar de Monteil, comte de Grignan, son oncle, lequel étant mort sans postérité, le substitua aux nom et armes d’Adhémar ; en sorte que les comtes de Grignan, qui ont porté depuis le nom d’Adhémar de Monteil, et qui sont éteints aujourd’hui, étoient de la maison de Castellane. (Note de Perrin.)