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1675çoit toujours de sa timidité, quand il est question de chercher une bonne compagnie. Il a été un jour entier à Laval, et a passé à trois lieues d’ici ; il y a bien de la vanité à ce discours, mais je dis vrai. Voyez par combien de raisons il devoit me venir voir : Provence, Pompone, Grignan[1].

Je[2] suis étonnée de l’accident de ma pauvre commère Bandol[3]. Je m’en prends au soleil de Provence, et je porte mes inquiétudes plus loin. Au nom de Dieu, prenez garde de n’être point tête à tête avec D*** Évitez tant que vous pourrez de le voir malade : c’est une chose terrible.

Je fus hier chez la princesse ; j’y trouvai un gentilhomme de ce pays, très-bien fait, qui perdit un bras le jour que M. de Lorges repassa le Rhin[4] ; je l’interrogeai extrêmement sur tout ce qui se passa à cette armée, et de la douleur et du désordre qu’y apporta la mort de M. de Turenne : ce détail d’un homme qui y étoit est toujours fort curieux. Il est capitaine dans un régiment. Il vint à parler, sans me connoître, du régiment de Grignan et de son colonel : vraiment je ne crois pas que rien soit plus charmant que les sincères et naturelles louanges qu’il donna au chevalier ; les larmes m’en vinrent aux yeux. Pendant tout le combat, il[5] fit des actions de valeur et

  1. Le marquis de Vins étoit Provençal ; il étoit beau-frère de M. de Pompone, et proche parent de M. de Grignan. (Note de Perrin.)
  2. La lettre commence ici dans l’édition de la Haye (1726), qui seule contient ce paragraphe : « Je suis étonnée, etc. » Elle y est datée : « de Vitré, le 23 de…. » sans indication de mois ni d’année.
  3. Est-ce la femme du président de Bandol ? Voyez tome II, p. 98, note 4.
  4. À l’affaire d’Altenheim. (Note de Perrin.)
  5. Au lieu du pronom il, on lit dans la seconde édition de Perrin : « le chevalier ; » un peu plus loin : « cet officier, » pour « cet homme ; puis, dans les deux éditions : « ce beau-frère, » pour « ce garçon-là. »