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1675feroient plus de mal que de bien, par la haine de deux hommes. Je crois que nous ne laisserons pas de trouver, ou du moins de promettre toujours les trois millions, sans que notre ami[1] soit abîmé ; car il s’est coulé une affection pour lui dans les états, qui fait qu’on ne songe qu’à l’empêcher de périr. Il me semble qu’en voilà assez pour ce chapitre.

Je suis aise que vous ne soyez point retournée à Grignan : c’est de la fatigue et de la dépense ; cette sagesse et cette règle, dont le bien Bon vous rend mille grâces, ont empêché ce mouvement. Mandez-moi si les petits enfants ne viennent pas vous trouver. Nous avons ici un temps admirable ; nous faisons des allées nouvelles d’une grande beauté. Mon fils nous amuse, et nous est très-bon : il prend l’esprit des lieux où il est, et ne transporte rien de la guerre ni de la cour dans cette solitude, que ce qu’il en faut pour la conversation ; et quand il ne pleut point, nous sommes bien moins à plaindre qu’on ne pense de loin ; le temps que nous avons destiné ici passera comme un autre. Ma lettre n’a pas été jusqu’à M. de Louvois ; tout se passe entre Lauzun et nous : s’il veut prendre le guidon, nous offrons un léger supplément ; s’il veut vendre sa charge entière, contre toute sorte de raison, qu’il cherche un marchand de son côté, comme nous du nôtre : voilà tout.

J’ai écrit au chevalier, pour m’affliger avec lui de ce qu’il ne m’a pas trouvée à Paris : nous ferions de belles lamentations sur notre société de l’année passée, et nous repleurerions fort bien M. de Turenne. Je ne sais quelle idée vous avez de la princesse[2] ; elle n’est rien moins

  1. D’Harouys. Voyez Walckenaer, tome V, p. 186 et suivantes.
  2. La princesse de Tarente. Elle avait perdu son mari le 14 septembre 1672.