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1675mais sans cela je saurois bien qu’en dire : je vous en montrerai, et vous en jugerez. Vous croyez bien aisément que je ne souhaite rien avec tant de passion que de raccommoder Fontainebleau avec moi : je ne saurois encore soutenir la pensée du mal qu’il m’a fait[1], et vous êtes bien juste, quand vous croyez que mon amitié n’est jamais moins forte que ce jour-là, quoiqu’elle ne fasse pas tant de bruit.

Vous avez donc eu cet abbé de la Vergne[2], et les Essais de morale ; ceux que je vous envoie arrivent à peu près aussi diligemment que nos réponses. Le traité de tenter Dieu me paroît le plus utile, et celui de la ressemblance de l’amour-propre et de la charité, le plus lumineux, pour parler leur langage[3] ; mandez-m’en votre avis et toujours beaucoup de vos nouvelles. Je vous trouve bien à votre aise dans votre chaise ; il ne seroit question que de voir entrer quelqu’un qui ne fût point à Aix. Hélas ! vous souvient-il de tout ce qui entroit l’hiver passé ? Vous avez touché bien droit à ce qui fait mon indifférence pour mon retour : elle est telle que sans les affaires que nous avons à Paris, je ne verrois aucun jour que je voulusse prendre plutôt qu’un autre pour quitter cet aimable désert ; mais plusieurs raisons

  1. Mme de Sévigné s’y était séparée de sa fille le 24 mai 1675. Voyez tome III, p. 455, note 4 ; voyez aussi la lettre du 28 mai 1676.
  2. Pierre de la Vergne de Tressan, d’une ancienne et noble famille du Languedoc, naquit en 1618. Il abjura, à l’àge de vingt ans, la religion réformée, entra dans les ordres, et s’attacha à l’évêque d’Aleth, Nicolas Pavillon. Il se consacra aux missions, et convertit un grand nombre de protestants dans le Languedoc, les Cévennes, la Provence et le Dauphiné. La dernière de ses missions fut celle que lui confia le cardinal de Grimaldi dans la ville et le diocèse d’Aix. Il se noya en passant le Gardon en litière, le 5 avril 1684. Voyez les lettres du 26 août 1676 et du 17 novembre 1688.
  3. Voyez tome II, p. 375, et note 9.