Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 4.djvu/358

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1676berté à nos amis de nous servir à leur mode. Il me paroît qu’ils ont observé beaucoup de régime et[1] de ménagement du côté de Provence- : il faut sur cela suivre leurs pensées et ce qui leur convient[2], d’autant plus agréablement, qu’ils ont bien voulu me laisser voir d’ici le dessous des cartes, qui est enchanté pour vous. Ils me viennent d’écrire tous deux sur ma maladie ; voyez s’il y a rien de si obligeant : voilà les lettres. Ainsi, ma fille, gardez-moi donc bien tous mes petits secrets, et gardons-nous bien de nous plaindre des gens dont nous devons nous louer.

Je comprends le bruit et l’embarras que vous avez dans votre rond[3]. Mandez-moi si le bonhomme de Sannes[4] joue toujours au piquet, et s’il croit être en vie. Voici le temps qu’il faut se divertir malgré qu’on en ait ; si vous en étiez aussi aise que votre fille l’est de danser, je ne vous plaindrois pas : jamais je n’ai vu une petite fille si dansante naturellement. Au reste, je suis entièrement de votre avis sur les Essais de morale ; je gronde votre frère : le voilà qui va vous parler.

de charles de sévigné.

Et moi je vous dis que le premier tome des Essais de morale vous paroitroit tout comme à moi, si la Marans et l’abbé Têtu ne vous avoient accoutumée aux choses fines et distillées. Ce n’est pas d’aujourd’hui que les gali-

  1. De régime et manque dans l’édition de 1734.
  2. « Suivre leurs vues et leurs pensées. » (Édition de 1754.)
  3. C’est un cabinet appelé le rond, parce qu’il est pratiqué dans une ancienne tour du palais des comtes de Provence, où étoit le logement de M. de Grignan à Aix. (Note de Perrin, 1754.) — Ce palais a été abattu au commencement de la Révolution. (Note de l’édition de 1818.)
  4. Conseiller au parlement d’Aix. Voyez la lettre du 8 mars suivant.