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1676quitter après cinq semaines de martyre, je me retrouverai dans une parfaite santé. Comme j’aime à être dorlotée, je ne suis pas fâchée que vous me plaigniez un peu, et que vous soyez persuadée qu’un rhumatisme, comme celui que j’ai eu, est le plus cruel de tous les maux que l’on puisse avoir. Le frater m’a été d’une consolation que je ne vous puis exprimer ; il se connoît assez joliment en fièvre et en santé ; j’avois de la confiance en tout ce qu’il me disoit : il avoit pitié de toutes mes douleurs, et le hasard a voulu qu’il ne m’ait trompée en rien de ce qu’il m’a promis, pas même à la promenade d’hier, dont je me suis mieux portée que je n’espérois. Larmechin, de son côté, m’a toujours veillée depuis cinq semaines, et je ne comprends point du tout ce que j’eusse fait sans ces deux personnes. Si vous voulez savoir quelque chose de plus d’un rhumatisme, demandez-le au pauvre Marignanes[1], qui me fait grand’pitié, puisqu’il est dans l’état d’où je ne fais que de sortir. Ne croyez point que la coiffure en toupet[2], et les autres ornements que vous me reprochez, aient été en vogue : j’ai été malade, de bonne foi, pour la première fois de ma vie,

Et pour mon coup d’essai, j’ai fait un coup de maître[3].


Tout le soin que l’on a eu de ma santé en Provence marque bien celui qu’on a de vous plaire : je vous prie de ne pas laisser d’en faire mes remerciements partout où vous le jugerez à propos. Je ne cherche plus que des forces pour nous mettre sur le chemin de Paris, où mon fils s’en va

  1. LETTRE 503. — Voyez tome III, p. 83, note x.
  2. Voyez ci-dessus, p. 79.
  3. Corneille, le Cid, acte II, scène ii :
    Mes pareils à deux fois ne se font point connoître,
    Et pour leurs coups d’essai veulent des coups de maître.