Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/223

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1683 Madame votre chère épouse, et mes petites chères, et la très-bonne.

Vendredi 12e[1].

Il y a deux jours que cette lettre devoit être envoyée ; le bien Bon l’a oubliée sur sa table : j’en suis ravie, car je vais répondre à votre dernière lettre ; elle est charmante, et m’a fait rire de tout mon cœur. Eh bien ! ne vous l’avois-je pas bien dit, que vous aviez tort ? Vous avez, Dieu merci, perdu votre procès dans votre propre tripot[2], et vous voilà de seigneur devenu plaît-il maître ? comme vous dites fort bien ; mais Gauthier dit encore mieux. Je le vois dire ce que vous me mandez, et pour vous dire vrai, mon zèle se refroidit ; et soit une bonne ou une sotte chose, je ne veux pas surpasser la mère de Chantal, qui seroit proprement vouloir aller par delà paradis. Ainsi, nous voilà en repos, ne voulant pour les dépens que le plaisir d’être plus habile que vous et de vous donner des leçons sur les droits honorifiques.

Je reviens de Versailles ; j’ai vu ces beaux appartements, j’en suis charmée. Si j’avois lu cela dans quelque roman, je me ferois un château en Espagne d’en voir la vérité. Je l’ai vue et maniée ; c’est un enchantement, c’est une véritable liberté, ce n’est point une illusion comme je le pensois. Tout est grand, tout est magnifique, et la musique et la danse sont dans leur perfection. Ce fut à ces deux choses que je m’attachai, et elles me firent fort bien faire ma cour, comme étant un peu de la vocation[3] de l’un et de l’autre. Mais ce qui plaît

  1. 8. Le commencement de cette seconde lettre, ainsi que le post-scriptum qui précède, sont écrits au verso de la dernière page de la lettre du 9 février, et en sens inverse de cette page.
  2. 9. Voyez tome II, p. 20, note 2.
  3. 10. Il y a plutôt vacation que vocation dans le manuscrit. Voyez tome VI, p. 17, note 1.