chose à une substance qui pense, que de n’oser penser. Je remercie les beaux yeux de Mlle d’Alerac des larmes qu’ils ont répandues pour moi ; mais, mon Dieu ! quels remerciements n’aurois-je point aussi à vous faire de tant de tendresse, de tant de douleur ? Ah ! il faut passer cela bien vite : croyez, en un mot, que mon cœur est à vous, que tout vous y cède, et vous y laisse régner souverainement.
1684
932. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.
Je n’ai point de vos nouvelles, ma très-chère, et c’est la chose du monde que je souhaite le plus présentement. Je vous ai écrit d’Étampes et d’Orléans[1] ; je vous envoyois l’excuse du bon abbé du Pile[2] : lui seul nous étoit bon car pour Mme de Pont[3], dont je vous avois parlé, et qui a bien de l’esprit et du mérite, mon oncle l’abbé en eut une telle frayeur, qu’il ne vivoit plus. J’allai donc le matin la voir ; elle cause en perfection ; je lui fis entendre ce qui m’empêchoit de la prier de s’embarquer avec nous ; elle l’entendit joliment, et voyant combien il falloit peu languir avec elle, j’eus peur à mon tour d’être obligée d’avoir de l’esprit treize ou quatorze heures durant, dans mon carrosse, qui est devenu ba-
- ↑ Lettre 932. — 1. La lettre écrite d’Orléans ne s’est point retrouvée parmi les originaux. (Note de Perrin.)
- ↑ 2. L’abbé de Pile, dont il est parlé dans une note du tome VI (p. 65, note 7), devait être alors à Venise, et il est très-peu vraisemblable qu’il s’agisse de lui ici.
- ↑ 3. Elle étoit Bossuet, et cousine germaine de Monsieur de Meaux. (Note de Perrin.)