Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/9

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

1680 que nous ne fussions nommées dans le Mercure galant. Ce petit voyage ne dérange rien du tout à notre commerce ; vous savez si ce commerce m’est nécessaire[1]. Pour vous, ma belle, vous louez trop mes lettres : ce qui me vient sur notre amitié ne peut être que fort naturel, et même je retranche beaucoup sur ce sujet. Vous m’auriez bien étonnée de me renvoyer ce que je vous ai dit de Mme  de la Sablière[2] ; ce n’est pas qu’il ne m’eût été nouveau, car j’écris vite, et cela sort brusquement de mon imagination. Mais ne nous mettons point cela dans la tête ; j’ai pensé mille fois à vous redire, dans mes lettres, des endroits et des tours si bons et si agréables des vôtres, que nous ne ferions plus que nous redonner à nous-mêmes. M. de Grignan y trouveroit son compte ; il ne trouveroit point[3] de ces endroits affreux que vous êtes obligée de lui cacher pour me conserver l’honneur de son estime. Il diroit bien, ce me semble, comme la Reine mère : « Fi, fi, fi, de cette grâce[4] ! » Je n’oserois lui confier ce que j’ai fait écrire sur le grand autel de ma chapelle : il croiroit tout à l’heure que je conteste l’invocation des saints ; mais enfin, pour éviter toute jalousie, voici ce qu’on y lit en lettres d’or :

Soli Deo honor et gloria[5].

Cela ne me brouille pas avec la princesse de Tarente[6].

  1. 7. « Notre commerce ne sera point du tout dérangé de ce petit voyage ; vous savez si cela m’est nécessaire. » (Édition de 1754.)
  2. 8. Voyez la lettre du 14 juillet précédent, tome VI, p. 527 et 528.
  3. 9. « Il ne verroit point. » (Édition de 1754.)
  4. 10. Voyez la lettre du 12 juin précédent, tome VI, p. 449. — Dans le texte de 1754 : de la grâce.
  5. 11. À Dieu seul honneur et gloire. — Voyez la 1re Épître de saint Paul à Timothée, chapitre Ier, verset 17.
  6. 12. Mme  de Tarente étoit de la religion protestante, qui n’admet