Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/92

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1680 en parlerai une autre fois. On m’avoit promis la harangue du Coadjuteur[1], je ne l’ai point eue ; mon fils et bien d’autres m’ont dit qu’elle étoit admirable. Mais parlons un peu de votre santé. N’êtes-vous point effrayée de ces jambes froides et mortes ? Est-il possible que dans le pays des bains chauds, vous trouviez le moyen de laisser périr vos pauvres jambes que vous ne sentez que par des douleurs ? N’y a-t-il point de lavages qui puissent vous ramener les esprits à ces parties comme abandonnées ? Trouve-t-on cette incommodité de peu de conséquence ? Le bain ne vous y a point fait de bien : faut-il en demeurer là ? Est-il possible qu’on puisse s’accommoder de gré à gré avec des maux si désagréables et si dangereux ? Vous me dites de me purger ; ah ! ma belle, il n’y a que deux jours que je pris une sotte bête de médecine, dont je commence à me remettre, car elle avoit ému une parfaite santé : je prends de cette eau de cerises, et plût à Dieu que l’on pût faire un commerce de santé ! je vous donnerois beaucoup de la mienne sans m’incommoder. Bonjour, ma très-parfaitement chère : je suis toute occupée de vous, de votre amitié, de votre santé[2]. S’il n’y a qu’un moment qu’Adam a péché, il n’y a qu’un jour jusqu’à celui que je vous embrasserai de tout mon cœur. Je suis trop heureuse de l’espérer, et je ne veux point gâter cette joie par des noirceurs et des prévoyances ingrates envers Dieu.

Mon fils vouloit vous écrire, et vous mander qu’il traduira ce que vous lui ordonnez, et qu’il profitera de vos conseils. Il m’a fait voir ces petits ouvrages de la Fontaine ; je ne sais comme je ne vous l’ai point mandé. Il

  1. 16. Voyez tome VI, p. 558 et 559, et la note 12.
  2. 17. Le texte de 1754 n’a pas la phrase suivante et termine celle-ci par ces mots : « et du plaisir que j’aurai de vous embrasser bientôt. »