Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/220

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I

ne s’endorment pas, et voilà où nous en sommes. Si cette affaire dépendoit du maréchal d’Estrées, elle seroit très-assurée : Mme de la Fayette lui a écrit deux lettres d’une force qui l’engage puissamment[1]; il demande seulement que dans ce moment d’interrègne, il puisse entrevoir ce qui seroit agréable à la cour, et il conduit lui-même Mme de la Fayette, laquelle, de son côté, fait agir notre duchesse, et met l’abbé Têtu entre elle et M. de Croissi. Elle fait assurément des merveilles, et nous attendons l’effet de tous ses soins assez tranquillement pour la chose, mais blessés de la froideur et du silence de ce duc, dont les amitiés pour moi et pour mon fils, les vues, les avis, les manières, nous avoient fortement persuadés, avec toute la province, d’une distinction particulière. Voilà entre nous de quoi nous sommes affligés, et tellement surpris, que comparant ce qui s’est passé depuis leur départ avec tout ce qui s’est passé auparavant, nous perdons la raison, nous ne comprenons rien à cette horrible différence, et nous croyons que c’est un songe, de ces songes désagréables, qui font qu’on est ravi de s’éveiller et de retrouver la vérité. Nous vous manderons la suite; mais croyez qu’on ne peut être plus contents que nous le sommes du maréchal : il nous a écrit même, sans s’ouvrir autant qu’à Mme de la Fayette, de la manière du monde la plus obligeante. Pour M. de Lavardin, assurément c’étoit une fort jolie contenance[2] que de tenir les états ; mais c’étoit ôter la plus belle rose du chapeau du maréchal. Sa Majesté saura bien consoler M. de Lavardin quand elle voudra.

Que dites-vous de Mayence ? Le marquis d’Uxelles a

  1. 6. Tout ce qui suit le mot puissamment, jusqu’à « Pour M. de Lavardin, » manque dans l’édition de 1737.
  2. 7. « Pour M. de Lavardin, il est vrai que c’étoit une jolie contenance, etc. » (Édition de 1754.)