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ÉMILIE DE TOURVILLE
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se faisaient, achevèrent de la calmer, et de la convaincre qu’on ne travaillait que pour son bonheur.

Elle eut tout lieu d’en être entièrement convaincue quand elle vit, le quatrième jour après les explications qu’elle avait données, le comte entrer dans sa chambre en tenant le marquis de Luxeuil par la main. Mademoiselle, lui dit le comte, je vous amène à la fois l’auteur de vos infortunes et celui qui vient les réparer en vous suppliant à genoux de ne pas lui refuser votre main. À ces mots, le marquis se jette aux pieds de celle qu’il adore, mais cette surprise avait été trop vive pour Émilie ; pas assez forte pour la soutenir, elle s’était évanouie dans les bras de la femme qui la servait ; à force de soins, elle reprit pourtant bientôt l’usage de ses sens et se retrouvant dans les bras de son amant : Cruel homme, lui dit-elle, en versant un torrent de larmes, quels chagrins vous avez causés à celle que vous aimiez ! pouviez-vous la croire capable de l’infamie dont vous avez osé la soupçonner ? Émilie vous aimant pouvait être victime de sa faiblesse et de la fourberie des autres, elle ne pouvait jamais être infidèle. — Ô toi que j’adore, s’écria le marquis, pardonne un transport de jalousie horrible fondé sur des apparences trom-