Page:Saint-Lambert - Les Saisons, 1775.djvu/320

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quelques jours. Je fis porter le nègre sur mon vaisseau ; la négresse me conjura de ne la point séparer de lui, & de la recevoir avec son enfant ; j’y consentis. J’appris qu’ils étoient esclaves d’un Espagnol, qui avoit fait à la jeune Marien, c’est le nom de la belle négresse, quelques propositions mal reçues, & dont Francisque avoit voulu lui faire honte. L’Espagnol se vengea ; il prétendit que ces deux esclaves étoient chrétiens, parce qu’on leur avoit donné, selon l’usage des colonies, des noms chrétiens. Il avoit surpris le nègre dans quelques pratiques religieuses en usage au Benin ; il le fit cruellement mutiler, & se vanta de lui avoir fait grace. J’allai trouver cet homme barbare, je lui proposai de me vendre ces malheureux ; il fit d’abord quelque difficulté ; mais la somme que je lui offrois le rendit bientôt facile. J’emmenai ces esclaves & je les donnai à Wilmouth. Marien étoit devenue l’amie de sa femme ; & Francisque par son esprit, ses connoissances dans l’agriculture & ses mœurs, avoit mérité la confiance de Wilmouth & l’estime de tout le monde.

Il vint nous trouver à l’entrée de la nuit. Le chef des noirs, nous dit-il, est né au Benin, il