Page:Saint-Saëns - Rimes familières.djvu/74

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La faim, la soif, n’ont rien dont le cœur se désole,
Ni le soleil de feu, ni le désert géant ;
Qu’importe ! ils ont l’Amour : de tout il les console
Et le reste est néant.

Car l’Amour, engendrant voluptés et tortures,
N’était pas dans l’Eden aux vertus condamné :
Il fallait pour qu’il fût connu des créatures
Que le crime fût né.

C’est sur le Désespoir que fleurit l’Espérance ;
Pour que le Rut devînt l’Amour prodigieux
Il fallait aux humains le remords, la souffrance
Et les pleurs dans les yeux.

Sicut Dii ! Ce mot du tentateur suprême
Était-ce donc vrai : le Mal nous a divinisés.
L’Homme innocent jamais n’eût connu par lui-même
Tout le prix des baisers !