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LETTRES

en vous voyant et en m’accoutumant à ce que je me permets tout bonnement de trouver aimable et plein de charme.

J’ai bien pensé à ce départ qui, ce me semble, a tardé d’une couple de jours et dont il m’était venu un bruit vague qu’il pourrait bien tarder davantage. Malgré le plaisir qu’on aurait eu à vous garder, Princesse, je craignais pourtant qu’il n’en fût ainsi ; et, en effet, il eût paru que c’eût été de bien mauvais augure pour la cause que nous aimons, que l’Italie ne vous vît pas cette année. — Cette Suisse que j’ai habitée et que j’ai appréciée alors, a fort changé en effet depuis, et l’écume démocratique est de tout temps fort grossière, et là un peu plus qu’ailleurs. — M. Brenier, qui n’est pas Suisse du tout et qui me paraît le plus poli des gros hommes, laisse prendre bien aisément son nom : je lis ce journal qui m’impatiente ; mais ce qui me frappe, c’est qu’on le laisse chaque jour élever commodément sa tour d’attaque contre la place où l’on est : la tour est déjà à la hauteur des remparts ; il part de là des projectiles ennemis ; et pas un mot, pas un signe du Moniteur n’a remis à leur