Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t1, 1878.djvu/348

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
334
PORT-ROYAL.

Cyran s’était retiré de cette maison et y avait introduit pour confesseur en sa place un homme destiné à un grand rôle dans Port-Royal, M. Singlin ; lequel, sorti de la direction de M. Vincent, venait de s’attacher au docte abbé. Le chancelier Seguier et son frère l’évêque de Meaux avaient une nièce (mademoiselle de Ligny) postulante au Saint-Sacrement ; M. de Meaux interrogea lui-même la jeune fille ; l’archevêque de Paris, par ses officiers, fit aussi examiner la doctrine enseignée : on ne trouva rien à reprendre ; pourtant les préventions se propageaient. Quand M. de Gondi, voulant en finir avec cet Institut, pour lui plein de tracas, en fit retourner toutes les religieuses à Port-Royal, le 16 mai 1638, M. de Saint-Cyran, depuis deux jours, était déjà arrêté. Mais nous n’en sommes pas là, nous sommes en 1636 ; la mère Angélique ne fait que de rentrer à Port-Royal, et nous avec elle, heureux de voir ce pénible et vain épisode terminé.

Il est vrai que nous ne rentrons d’abord qu’à Port-Royal de Paris, cette maison de fraîche date. Patience ! Port-Royal des Champs, qui nous semble comme à la mère Angélique le seul vrai, ou du moins le seul aimable, va reparaître, et sous l’aspect principal qu’on se figure ; son vide même et son désert, à ce moment, en font le cadre tout trouvé qui attend nos solitaires.

L’année 1636[1] est l’année capitale pour nous, et dans laquelle tous les fils de notre histoire arrivent, se rejoignent et font nœud ; il faut compter : retour de la mère Angélique à Port-Royal (elle y a charge de maîtresse des novices et y fait des conférences qui renouvellent l’esprit) ; élection de la mère Agnès, à son retour, comme abbesse (après quelques préventions dissipées, elle entre dans les voies de Saint-Cyran) ; introduction de

  1. L’année du Cid : triomphe du théâtre et du cloître.