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LIVRE DEUXIÈME.

retrouvons vivante en effet et parfumant un assez beau fruit : Racine, au berceau, va s’en ressentir.

La liaison de la famille Racine avec Port-Royal, déjà commencée par le moyen de M. Vitart, date surtout étroitement de ce séjour des solitaires à la Ferté-Milon. La grand-mère paternelle du poète, madame Racine (Marie Des Moulins de son nom) avait déjà, on l’a vu, une sœur religieuse à Port-Royal, la cellérière : on dit même — et c’est Racine fils qui le dit, — qu’elle y eut deux sœurs religieuses. Ce qui est certain, c’est que madame Vitart, une autre de ses sœurs, sans entrer en religion, aura plus tard dans son veuvage tout le zèle d’une humble servante de Dieu, uniquement voué à cacher, à recéler les amis de la vérité. La fille de Marie Des Moulins, la tante de Racine, prendra le voile à son tour et sera, un jour, célèbre comme abbesse ; elle-même, cette aïeule du poète et qui lui servira de mère, madame Racine devenue veuve, viendra passer à la maison des Champs les dernières années de sa vie, s’y employant de son mieux, et lui, Racine, qui naissait précisément en cette année 1639, y put, par la suite, nourrir et charmer les plus belles heures de son enfance[1]

Sur la fin de l’été de 1639, les choses étant un peu apaisées, on pensa que MM. Le Maître et Séricourt pouvaient, sans trop d’inconvénients, revenir très incognito à Port-Royal des Champs. M. Vitart père, une de leurs conquêtes, les accompagna et se fit comme l’économe du monastère, les déchargeant de tout autre soin que celui de l’étude et de la prière. Mais quand il mourut, en août 1642, ces Messieurs durent rompre un peu leur solitude pour s’occuper des soins du ménage et des

  1. Tous les détails concernant la généalogie de Racine et ses affinités domestiques avec Port-Royal ont été fixés dans la dernière précision par M. Paul Mesnard ( Notice biographique sur Jean Racine, 1865).