Page:Sainte-Beuve - Volupté.djvu/207

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

sais quel mot insignifiant sur madame de Greneuc et mademoiselle Amélie, qui m'avait fait une impression pénible, comme tout ce qui se rattachait à ces temps et à cette histoire. L'idée de mes torts anciens confirma en moi la résolution de n'en pas avoir du moins de nouveaux. J'en revins à projeter sérieusement une vie de sacrifice. La noble image de mademoiselle Amélie m'inspirait naturellement cela. Je me dis donc que, si l'affaire de Georges me laissait libre, ainsi qu'il devenait à chaque instant plus probable, j'irais et j'habiterais à Blois mettant mon avenir entier à décorer l'existence de mes amis. Tout empire de madame R. avait disparu. Pour mieux m'affermir dans mon dessein et m'enlever le prétexte même des scrupules honorables je m'avisai, en rentrant, d'écrire au marquis ; dans cette lettre, après bien des effusions et des entourages sur ses blessures je lui touchais quelque chose de l'état de mon pauvre cœur, de certaines anxiétés vagues que j'y ressentais, et des passions toujours promptes de la jeunesse, lui demandant s'il ne voyait d'inconvénient pour personne à cette union de plus en plus étroite où il me conviait. Je n'aurais jamais pris sur moi de lui articuler en face un mot à ce sujet ; je n'aurais point d'ailleurs été sûr de le faire dans la mesure délicate qui convenait, et c'est pourquoi je préférais écrire. n'y avait-il pas aussi dans cette singulière démarche une arrière-pensée non avouée d'être plus libre désormais selon l'occasion et plus dégagé de procédés à son égard l'ayant, en quelque sorte, averti ?

Je ne pense point que cette méchante finesse se soit glissée là-dessous ; mais la nature est si tortueuse et si troublée de replis que je n'oserais rien affirmer. Le soir donc en le quittant, je lui remis un peu honteusement la lettre, et lui dis de lire cela et qu'il me donnerait réponse le lendemain.

Nous étions au lendemain, au jour du départ. Vers