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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/224

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et que quatre belles pêches disparurent de l’espalier où il les regardait mûrir ; méfaits dont Hippolyte peut-être fut le seul coupable. N’importe, Deschartres accusait les brigands, et il ne se calma que lorsque ma bonne maman lui dit avec un grand sérieux : « Eh bien ! monsieur Deschartres, quand vous écrirez l’histoire de ces temps-ci, vous n’oublierez pas un fait si grave. Vous direz : « Une armée entière traversa Nohant et porta le ravage et la dévastation sur un espalier, où l’on comptait quatre pêches avant cette terrible époque. »

Je me rappelle qu’il y eut pourtant un autre fait un peu plus grave et que je raconte précisément pour montrer combien ces brigands se piquaient d’honneur et de probité.

Nous vîmes passer des régimens de toutes armes, des chasseurs, des carabiniers, des dragons, des cuirassiers, de l’artillerie et ces brillans mamelucks avec leurs beaux chevaux et leur costume de théâtre, que j’avais vus à Madrid. Le régiment de mon père passa aussi, et les officiers, dont plusieurs l’avaient connu, entrèrent dans la cour et demandèrent à saluer ma grand’mère et ma mère. Elles les reçurent en sanglotant, prêtes à s’évanouir. Un officier dont j’ai oublié le nom s’écria en me voyant : « Ah ! voilà sa fille. Il n’y a pas à se tromper à une pareille ressemblance. » Il me prit dans ses bras et m’embrassa en me disant : « Je vous ai vue