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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/261

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devenais à ces heures-là, pas même Rose, qui pourtant ne me laissait guère tranquille, pas même Liset, qui me suivait partout comme un petit chien.

Voici ce que j’avais imaginé. Je voulais élever un autel à Corambé. J’avais d’abord pensé à la grotte en rocaille qui subsistait encore, quoique ruinée et abandonnée : mais le chemin en était encore trop connu et trop fréquenté. Le petit bois du jardin offrait alors certaines parties d’un fourré impénétrable. Les arbres, encore jeunes, n’avaient pas étouffé la végétation des aubépines et des troënes qui croissaient à leur pied, serrés comme les herbes d’une prairie. Dans ces massifs que côtoyaient les allées de charmille, j’avais donc remarqué qu’il en était plusieurs où personne n’entrait jamais et où l’œil ne pouvait pénétrer durant la saison des feuilles. Je choisis le plus épais, je m’y frayai un passage et je cherchai dans le milieu un endroit convenable. Il s’y trouva, comme s’il m’eût attendue. Au centre du fourré s’élevaient trois beaux érables sortant d’un même pied, et la végétation des arbustes étouffés par leur ombrage s’arrondisssait à l’entour pour former comme une petite salle de verdure. La terre était jonchée d’une mousse magnifique, et, de quelque côté qu’on portât les yeux, on ne pouvait rien distinguer dans l’interstice des broussailles à deux pas de soi. J’étais donc là aussi seule, aussi cachée qu’au fon