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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/296

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grand pour avoir voulu tromper ses disciples. Il les avait conviés à un repas fraternel, il les avait invités à rompre le pain ensemble en mémoire de lui. Je ne sentis plus rien de moquable dans l’institution de la Cène, et, me trouvant à la balustrade auprès d’une vieille pauvresse qui reçut dévotement l’hostie avant moi, j’eus la première idée de la signification de ces agapes de l’égalité dont l’Église avait, selon moi, méconnu ou falsifié le symbole.

Je revins donc fort tranquille de la sainte table, et le contentement d’avoir trouvé une solution à ma petite anxiété donna, m’a-t-on dit depuis, une expression nouvelle à ma figure. Ma grand’mère, attendrie et effrayée, partagée peut-être entre la crainte de m’avoir rendue dévote et celle de m’avoir fait mentir à moi-même, me pressa doucement contre son cœur quand je revins auprès d’elle, et laissa tomber des larmes sur mon voile.

Tout cela fut énigmatique pour moi ; j’attendais qu’elle me donnât, le soir, une explication sérieuse de l’acte qu’elle m’avait fait accomplir et de l’émotion qu’elle avait laissée paraître. Il n’en fut rien. On me fit faire une seconde communion huit jours après, et puis, on ne me reparla plus de religion, il n’en fut pas plus question que si rien ne s’était passé.

Aux grandes fêtes, on m’envoyait encore à La Châtre pour voir les processions et assister