Aller au contenu

Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/307

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

la détestez. Elle vous abandonne ; dans trois jours vous partirez pour Paris.

— Vous en avez menti, lui répondis-je, menti avec méchanceté, je ne déteste pas ma grand’mère, je l’aime : mais j’aime mieux ma mère, et si l’on me rend à elle, je remercie le bon Dieu, ma grand’mère et même vous. »

Là-dessus je lui tournai le dos et montai résolûment à ma chambre. J’y trouvai Rose, qui ne savait pas ce qui venait de se passer et qui ne me dit rien. Je n’avais ni sali ni déchiré mes hardes ce jour-là, le reste la préoccupait fort peu. Je passai trois grands jours sans voir ma bonne maman. On me faisait descendre pour prendre mes repas quand elle avait fini les siens. On me disait d’aller prendre l’air au jardin quand elle était enfermée, et elle s’enfermait ou on l’enfermait bien littéralement, car lorsque je passais devant la porte de sa chambre, j’entendais mettre la barre de fer avec une sorte d’affectation, comme pour me dire que tout repentir serait inutile.

Les domestiques semblaient consternés, mais j’avais un air si hautain, apparemment, que pas un n’osa me parler, pas même Rose, qui devinait peut-être bien qu’on s’y prenait mal et qu’on excitait mon amour pour ma mère au lieu de le refroidir. Deschartres, soit par système, soit par suite d’une appréciation analogue à celle de Rose, ne me parlait pas non plus. I