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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/458

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écrit et les détails leur plurent. Mais elles déclaraient que Fitz Gérald (c’était le nom du héros) était un personnage fort ennuyeux, et que l’héroïne n’était guère plus divertissante. Il y avait une mère qui leur plut davantage ; mais, en somme, ma prose eut moins de succès que mes vers, et ne me charma point moi-même. Je fis un autre roman, un roman pastoral, que je jugeai plus mauvais que le premier et dont j’allumai le poêle un jour d’hiver. Puis je cessai d’écrire, jugeant que cela ne pourrait jamais m’amuser, et trouvant qu’en comparaison de l’infinie jouissance morale que j’avais goûtée à composer sans écrire, tout serait à jamais stérile et glacé pour moi.

Je continuais toujours, sans l’avoir jamais confié à personne, mon éternel poème de Corambé. Mais c’était à bâtons rompus, car au couvent, comme je l’ai dit, le roman était en action, et le sujet, c’était la victime du souterrain, sujet bien plus émouvant que toutes les fictions possibles, puisque nous prenions cette fiction au sérieux.

Ma grand’mère vint au milieu du second hiver que je passai au couvent. Elle repartit deux mois après, et je sortis, en tout, cinq ou six fois. Ma tenue de pensionnaire ne lui plut pas mieux que ma tenue de campagnarde. Je ne m’étais nullement formée aux belles manières. J’étais plus distraite que jamais. Les leçons de danse de M. Abraham, ex-professeur de grâces de Marie-Antoinette, ne m’avaient donné aucune espèce de grâce.