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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/521

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elle la purge de beaucoup de petitesses et de mesquines préoccupations.

Quoique l’être humain soit dans la conduite de sa vie un abîme d’inconséquences, une certaine logique fatale le ramène toujours à des situations analogues à celles où son instinct l’a déjà conduit. Si l’on s’en souvient, j’étais parfois à Nohant, devant les soins et les leçons de ma grand’mère, dans la même disposition de soumission inerte et de dégoût secret que celle où je me retrouvais au couvent devant les études qui m’étaient imposées. À Nohant, ne pensant qu’à me faire ouvrière avec ma mère, j’avais méprisé l’étude comme trop aristocratique. Au couvent, ne songeant qu’à me faire servante avec sœur Hélène, je méprisais l’étude comme trop mondaine.

Je ne sais plus comment il m’arriva de me lier avec Elisa. Elle avait été froide et même dure avec moi durant mes diableries. Elle avait des instincts de domination qu’elle ne pouvait contenir, et lorsqu’un diable dérangeait sa méditation à l’église ou bouleversait ses cahiers à la classe, elle devenait pourpre ; ses belles joues prenaient même rapidement une teinte violacée, ses sourcils déjà très rapprochés, s’unissaient par un froncement nerveux ; elle murmurait des paroles d’indignation, son sourire devenait méprisant, presque terrible ; sa nature impérieuse et hautaine se trahissait. Nous disions alors