Aller au contenu

Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/532

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

retournai auprès de ma malade, qui était dans le plus complet abandon. Elle grelotait de froid ; j’allai lui chercher la couverture de mon lit, et la tisane chaude la réchauffa un peu. On disait la prière à la classe, on allait se retirer. Je fus demander à la Comtesse, qui véritablement ne me refusait jamais rien, la permission de veiller sœur Hélène qui était malade. « Comment ? » dit-elle d’un air étonné, « Sœur Hélène est malade, et il n’y a que vous pour la soigner ? » — « C’est comme cela, madame ; me le permettez-vous ? » — « Allez, ma très chère, » répondit-elle, « tout ce que vous faites ne peut-être que fort agréable à Dieu. » Ainsi me traitait cette excellente personne dont je m’étais tant moquée, et qui n’avait souci et rancune d’aucune chose au monde quand il ne s’agissait que de son perroquet et du chat de la mère Alippe.

Je restai auprès de sœur Hélène jusqu’au moment où l’on vint fermer les portes de communication des dortoirs. Elle dormait enfin et paraissait tranquille quand je la quittai. Elle avait mortellement souffert pendant quelques heures, et il lui était arrivé de dire en se tordant sur son lit : « On ne peut donc pas mourir ! » Mais pas une plainte contre qui que ce fût ne lui était échappée, et le lendemain je la trouvai au travail, souriante, et presque gaie. C’était la bienfaisante mobilité de l’enfant unie à la résignation et au courage d’une sainte.