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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/533

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Cette mystérieuse aventure avait laissé en moi plus de traces qu’en elle : je vis bien, aux manières des religieuses avec moi et à la liberté qu’on me laissait de la voir à toute heure du jour, que je n’étais pour rien dans l’orage qui avait passé sur sa tête. Mais je n’en restai pas moins pensive et brisée, non pas ébranlée dans ma foi, mais troublée dans mon bonheur et dans ma confiance.

Vers ce même temps, je crois, la mère Alippe mourut d’un catarrhe pulmonaire endémique qui mit aussi en danger la vie de la supérieure et de plusieurs autres religieuses. Je n’avais jamais été particulièrement liée avec la mère Alippe. Pourtant je l’aimais beaucoup : j’avais pu apprécier, à la petite classe, la droiture et la justice de son caractère. Elle fut fort regrettée, et sa mort presque subite (après quelques jours de maladie seulement) fut accompagnée de circonstances déchirantes. Sa sœur Poulette, qui la soignait et qui avait aussi, comme infirmière, à soigner les autres et la supérieure, montra un courage admirable dans sa douleur, au point de tomber évanouie et comme morte elle-même dans l’infirmerie, au milieu de ses fonctions, le jour de l’enterrement de mère Alippe.

Cet enterrement fut beau de tristesse et de poésie : les chants, les larmes, les fleurs, la cérémonie dans le cimetière, les pensées plantées immédiatement sur sa tombe et que nous nous