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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/576

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Est-ce tu ne sais pas qu’on ne peut pas te marier sans mon consentement ? Est-ce que je le donnerai jamais quand il s’agira d’un monsieur qui prendrait de grands airs avec moi ? Allons donc ! Je me moque bien de toutes les menaces. Tu m’appartiens, et quand même on réussirait à te mettre en révolte contre ta mère, ta mère saura bien retrouver ses droits ! »

Ainsi ma mère, exaspérée, semblait vouloir douter de moi et s’en prendre à ma pauvre âme en détresse pour exhaler ses amertumes. Je commençai à pressentir quelque chose d’étrange dans ce caractère généreux, mais indompté, et il y avait, à coup sûr, dans ses beaux yeux noirs quelque chose de terrible qui, pour la première fois, me frappa d’une secrète épouvante.

Je trouvai, par contraste, ma grand’mère plongée dans une tristesse abattue et plaintive qui me toucha profondément. « Que veux-tu, mon enfant ? me dit-elle lorsque j’essayai de rompre la glace ; ta mère ne peut pas ou ne veut pas me savoir gré des efforts immenses que j’ai faits et que je fais tous les jours pour la rendre heureuse. Ce n’est ni sa faute ni la mienne, si nous ne nous chérissons pas l’une l’autre : mais j’ai mis les bons procédés de mon côté en toutes choses, et les siens sont si durs que je ne peux plus les supporter. Ne peut-elle me laisser finir en paix ? Elle a si peu de temps à