Aller au contenu

Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/672

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

abandonner un instant ses convictions intimes et sans mentir en rien à sa dignité personnelle.

Avant de recevoir l’hostie, elle prit encore la parole et dit très haut : « Je veux mourir en paix ici avec tout le monde. Si j’ai fait du tort à quelqu’un, qu’il le dise, pour que je le répare. Si je lui ai fait de la peine, qu’il me le pardonne, car je le regrette. »

Un sanglot d’affection et de bénédiction lui répondit de toutes parts. Elle fut administrée, puis demanda du repos et resta seule avec moi.

Elle était épuisée et dormit jusqu’au soir. Quelques jours d’accablement succédèrent à cette émotion. Puis les apparences de la santé revinrent, et nous retrouvâmes encore quelques semaines d’une sorte de sécurité.

Cet événement de famille me fit et me laissa une forte impression. Ma grand’mère, bien qu’elle fût retombée dans un demi-engourdissement de ses facultés, avait, par ce jour de courage et de pleine raison, repris, à mes yeux, toute l’importance de son rôle vis-à-vis de moi, et je ne m’attribuais plus aucun droit de juger sa conscience et sa conduite. J’étais frappée d’un grand respect en même temps que d’une tendre gratitude pour l’intention qu’elle avait eue de me complaire, et il m’était impossible de ne pas accepter de tous points sa manière de se repentir et de se réconcilier avec le ciel, comme digne, méritoire et agréable à Dieu. Je récapitulais toute