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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/708

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fait par l’intention, les jésuites avaient proclamé ce principe, probablement sans en voir tous les résultats en dehors de leur ordre.

La petite aventure de la fête du village avait donc été le prélude des calomnies monstrueusement ridicules qui se forgèrent sur mon compte peu de temps après, avec un crescendo des plus brillans. Il semblait que le mépris que j’en faisais fût un motif de fureur pour ces bonnes gens de La Châtre, et que mon indépendance d’esprit (présumée, puisqu’ils ne me connaissaient que de vue) fût un outrage au code d’étiquette de leur clocher.

J’ai déjà dit que la bicoque de La Châtre était remarquable par un nombre de gens d’esprit, considérable relativement à sa population. Cela est encore vrai, mais partout les bons esprits sont l’exception, même dans les grandes villes, et dans les petites, on sait que la masse fait loi. C’est comme un troupeau de moutons où chacun, poussé par tous, donne du nez là où la moutonnerie entière se jette. De là une aversion instinctive contre celui qui se tient à part ; l’indépendance du jugement est le loup dévorant qui bouleverse les esprits dans cette bergerie.

Mes relations d’amitié avec les familles amies de la mienne n’en souffrirent pas, et je les ai gardées intactes et douces tout le reste de ma vie.

Mais on pense bien que ma volonté de ne point voir par les yeux du premier venu ne fit