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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/769

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avait essayé de les lire, qu’elle n’y avait entendu goutte, et que ce devait être de mauvais livres. Croyait-elle réellement que je fusse vicieuse ou égarée, ou bien avait-elle besoin de trouver un prétexte à ses imputations, afin de pouvoir dénigrer la belle éducation que j’avais reçue ? Tous les jours c’étaient de nouvelles découvertes qu’elle me faisait faire sur ma perversité.

Quand je lui demandais, avec insistance, où elle avait pris de si étranges notions sur mon compte, elle disait avoir eu des correspondances à La Châtre, et savoir, jour par jour, heure par heure, tous les désordres de ma conduite. Je n’y croyais pas, je n’effrayais pas de l’idée que ma pauvre mère était folle. Elle le devina, un jour, au redoublement de silence et de soins qui étaient ma réponse habituelle à ses invectives. « Je vois bien, dit-elle, que tu fais semblant de me croire en délire. Je vais te prouver que je vois clair et que je marche droit. »

Elle exhiba alors cette correspondance sans vouloir me laisser jeter les yeux sur l’écriture, mais en me lisant des pages entières qu’elle n’improvisait certes pas. C’était le tissu de calomnies monstrueuses et d’aberrations stupides dont j’ai déjà parlé et dont je m’étais tant moquée à Nohant. Les ordures de la petite ville s’étaient emparées de l’imagination vive et faible de ma mère. Elles s’y étaient gravées jusqu’à détruire le plus simple raisonnement. Elles n’en sortirent entièrement