Page:Sand - Theatre complet 3.djvu/192

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FLAMINIO, ne se contenant plus.

Et où donc voulez-vous que j’aille ? Est-ce à moi que vous posez de pareils problèmes ? Oubliez-vous que je suis celui qui vit, celui qui aime, et non celui qui réfléchit et calcule ? (Il se lève, ainsi que Gérard.) Ah ! tenez, vous me tuez tous les deux ! Laissez-moi ! laissez-moi dans ma fièvre et dans mon rêve ! dans ma douleur et dans ma joie ! Laissez-moi ne pas savoir, ne pas prévenir, ne pas vouloir ! Je touche à une crise, dites-vous ? Non, je n’y touche pas, j’y suis ; elle va éclater, je le sens. Aujourd’hui, demain peut-être, elle m’aura emporté dans le ciel ou dans la tombe !… qu’importe !

LE DUC, haussant les épaules.

Tout ça n’est pas une conclusion. La mienne est qu’il faut épouser.

FLAMINIO.

Épouser ? Merci du conseil, mais je n’en ferai rien ; j’aime mieux souffrir. Et vous, Gérard, le vôtre ?

GÉRARD.

Ah ! je n’ose vous le dire, mon ami ; c’est trop cruel !

FLAMINIO.

M’éloigner, n’est-ce pas ? rompre ? Vous avez raison, merci ! mais j’aime mieux mourir !

On frappe ; il va ouvrir, un domestique sans livrée lui parle bas à la porte.
LE DUC, à Gérard.

C’est elle qui l’envoie chercher, je parie ! c’est sans doute un raccommodement.

GÉRARD.

Comment ! est-ce que… ?

LE DUC.

Oui, oui, il y a de la brouille quelquefois. Vous sauriez ça si vous n’étiez pas devenu si mondain. Ah ! vous négligez le beau petit salon bleu !

GÉRARD.

Que voulez-vous ! je m’étourdis ; on s’ennuie tant à Paris !