Page:Sand - Valvèdre.djvu/154

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plus souffert que de toutes mes terreurs, et, à présent que vous voilà, je sens, moi aussi, qu’il faut que vous décidiez de moi, que je ne m’appartiens plus, et que, si nous nous quittons pour toujours, je perds la raison et la force de vivre !

J’étais enivré de cet abandon, l’espoir me revenait ; mais elle, elle revint bien vite à ses menaces.

— Avant tout, dit-elle, pour être heureuse de votre affection, il faut que je me sente respectée. Autrement, l’avenir que vous m’offrez me fait horreur. Si vous m’aimez seulement comme mon mari m’a aimée, et comme bien d’autres après lui m’ont offert de m’aimer, ce n’est pas la peine que mon cœur soit coupable et perde le sentiment de la fidélité conjugale. Vous m’avez dit là-bas que je n’étais capable d’aucun sacrifice. Ne voyez-vous pas que, même en vous aimant comme je fais, je suis une âme sans vertu, une épouse sans honneur ? Quand le cœur est adultère, le devoir est déjà trahi ; je ne me fais donc pas d’illusion sur moi-même. Je sais que je suis lâche, que je cède à un sentiment que la morale réprouve, et qui est une insulte secrète à la dignité de mon mari. Eh bien, qu’importe ? laissez-moi ce tourment. Je saurai porter ma honte devant vous, qui seul au monde ne me la reprocherez pas. Si je souffre de ma dissimulation vis-à-vis des autres, vous n’entendrez jamais aucune plainte. Je peux tout souffrir pour vous. Aimez-moi comme je l’entends, et si, de votre côté, vous souffrez de ma retenue, sachez souffrir, et trouvez en