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essai sur le libre arbitre

Leibniz, de même que Schelling dans sa dissertation sur la liberté, admette que l’âme se détermine avant le temps (extemporellement), etc. » Schelling est donc sur ce point à l’égard de Kant dans l’heureuse position d’Améric Vespuce par rapport à Colomb : la découverte faite par un autre se trouve signée de son nom. Il est juste de dire d’ailleurs que c’est là un fruit de sa sagacité et non point du hasard. Car il commence ainsi son chapitre, p. 465 : « C’est à l’idéalisme que revient le mérite d’avoir transporté la question de la liberté sur le terrain (du choix extemporel), etc., » et immédiatement après suit l’exposition des idées kantiennes. Ainsi, au lieu de nommer ici Kant, ce qui eût été conforme à la loyauté, il dit finement l’idéalisme ; mais sous cette expression équivoque chacun entendra la philosophie de Fichte et la première manière fichtienne de Schelling, et non pas la doctrine de Kant ; puisque celui-ci proteste contre l’appellation d’idéalisme donnée à sa philosophie, par exemple dans les Prolégomènes (p. 155 de redit. Rosenkranz), et a même ajouté à sa seconde édition de la Critique de la Raison pure, P. 274, une « Réfutation de l’idéalisme. » À la page suivante, Schelling glisse très-adroitement, dans une phrase incidente, les mots de « notion kantienne » de la liberté, apparemment pour fermer la bouche à ceux qui se sont déjà aperçus que