Page:Schopenhauer - Essai sur le libre arbitre, 1880, trad. Reinach.djvu/36

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
18
essai sur le libre arbitre

prochaine question s’énonce ainsi : Quel est le contenu de la conscience ? ou bien : Comment et sous quelle forme le moi que nous sommes se révèle-t-il immédiatement à lui-même ? — Réponse : En tant que le moi d’un être voulant[1]. Chacun de nous, en effet, pour peu qu’il observe sa propre conscience, ne tardera pas à s’apercevoir que l’objet de cette faculté est invariablement la volonté de sa personne ; et par là il ne faut pas seulement entendre les volitions qui passent aussitôt à l’acte, ou les résolutions formelles qui se traduisent par des faits sensibles. Tous ceux en effet qui savent distinguer, malgré les différences dans le degré et dans la manière d’être, les caractères essentiels des choses, ne feront aucune difficulté pour reconnaître que tout fait psychologique, désir, souhait, espérance, amour, joie, etc., ainsi que les sentiments opposés, tels que la haine, la crainte, la colère, la tristesse, etc., en un mot toutes les affections et toutes les passions, doivent être comptées parmi les manifestations de la volonté ; car ce ne sont encore là que des mouvements plus

  1. « Le sentiment immédiat de la force n’est autre que celui de notre existence même dont l’activité est inséparable… La cause, ou force actuellement appliquée à mouvoir le corps, est une force agissante que nous appelons volonté. Le moi s’identifie complètement avec cette force agissante. » (Maine de Biran, œuvres inédites, p. 49). C’est du reste le développement des idées de Leibniz. (Édit. Janet, t. II, p. 526.)