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MÉMOIRES SUR LES SCIENCES OCCULTES

donaï, etc., il évoquait le diable et le contraignait à lui obéir, sans lui promettre lui-même en retour quoi que ce soit, ce qu’on appelait : contraindre l’enfer. — Mais tout cela, simples explications et voiles sous lesquels se dérobe la chose, était tellement pris pour la chose elle-même, pour sa réalité objective que tous les écrivains, qui ont connaissance de la magie non par la pratique même, mais de seconde main, — comme Bodin, Delrio, Bindsfeldt, etc., — tous ceux-là estiment qu’elle consiste essentiellement à agir, non par les forces de la nature ni par la voie naturelle, mais avec l’aide du diable ! Telle était et restait partout l’opinion générale dominante, modifiée selon les lieux et les religions du pays ; et cette opinion servait de base aux lois contre la sorcellerie, aux procès de sorcellerie. C’était d’ordinaire également contre elle qu’étaient dirigées les objections faites contre l’idée de la possibilité de la magie. Cette conception et cette explication objective de la chose devait nécessairement se produire déjà pour la raison seule du réalisme décidé qui, au moyen âge, comme dans l’antiquité, dominait en Europe et fut pour la première fois ébranlé par Descartes. Jusqu’alors l’homme n’avait pas encore appris à diriger sa spé-