Page:Schwob - La Lampe de Psyché, 1906.djvu/233

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bois et de la chandelle, elle suivait des yeux, jusqu’à l’heure où elle allait dormir, le grouillement des merveilles.

Cependant la huche à pain étant vide, avec la boîte à sel, la nourrice implorait Marjolaine. « Marie-toi, disait-elle, ma fleurette aimée : votre mère pensait à Jean ; veux-tu pas épouser Jean ? Ma Jolaine, ma Jolaine, quelle jolie mariée tu feras ! »

— La mariée de la Marjolaine a eu des chevaliers, dit la rêveuse ; j’aurai un prince.

— Princesse Marjolaine, dit la nourrice, épousez Jean, tu le feras prince.

— Nenni, nourrice, dit la rêveuse ; j’aime mieux filer. J’attends mes diamants et mes robes pour un plus beau génie. Achète du chanvre et des quenouilles et un fuseau poli. Nous aurons notre palais bientôt. Il est pour le moment dans un désert noir d’Afrique. Un magicien l’habite, couvert de sang et de poisons. Il verse dans le vin des voyageurs une poudre brune qui les change en bêtes velues. Le palais est éclairé de torches vives, et les nègres qui servent aux repas ont des couronnes d’or. Mon prince tuera