Page:Schwob - Mœurs des diurnales, 1903.djvu/52

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boivent de l’encre[1] fluide : et, chose curieuse, leur urine est semblable à une encre boueuse et grasse. Leur attitude est voisine de celle des paons : ils font la roue et gloussent de satisfaction ; mais parfois ils aiment à se couvrir d’ordures comme les canards. On a grand’peine ensuite à les ramener à l’usage de la propreté.

Toute l’île est couverte de leurs excréments, qui sont minces et blancs comme des feuilles de papyrus ou de parchemin poncé, et lâchés de signes semblables aux signes de notre écriture. Et c’est dans les excréments de ces oiseaux que réside leur pouvoir sacré. Les habitants de l’île s’imaginent que ces excréments sont des oracles divins, et sont parvenus à les interpréter couramment, comme les feuilles de la Sibylle. Certains les ramassent et les vendent. Leur prix ne peut être fort élevé à cause de là quantité des excréments que ces oiseaux produisent. Il est à noter d’ailleurs que l’oracle de l’excrément n’est vrai que pour vingt-quatre, douze ou six heures, suivant sa forme. Aussitôt le soleil couché, les excréments de la journée sont balayés à l’écart ; et les excréments de la nuit perdent leur

  1. Atramentum